edito-eric2Ennéagramme, politique et responsabilité

Depuis quelques semaines, pas un jour ne se passe sans que l’on me demande le profil de Donald Trump ou de l’un de nos présidentiables français. Là où, en d’autres temps, je me serais amusé à donner un pronostic, je suis aujourd’hui devenu plus circonspect. Jouer à typer est rigolo sur le moment mais finalement dommageable. En effet, l’Ennéagramme propose notamment de retrouver l’unité intérieure, grâce à neuf archétypes.

Le travail consiste à accepter de limiter les excès de sa facette dominante et  à réactiver progressivement les autres parties de soi. Cela passe par une phase « découvrir et apprécier » chacune de ses facettes, symbolisées par neuf archétypes. Présenter l’Ennéagramme est donc une possibilité de donner envie à quelqu’un d’élargir son potentiel. Une des clés consiste à insister sur le fait qu’il n’y a pas de bon ou de mauvais type et que tout être humain est unique, quel que soit son profil dominant.

La tradition orale insiste sur le fait de ne pas prendre le pouvoir sur un participant en lui disant son « type », mais plutôt de lui laisser le temps et les moyens de le découvrir par lui-même. La tradition orale de l’Ennéagramme propose également de nommer le moins possible d’exemples de célébrités qui correspondraient à tel ou tel type. L’expérience aidant, nous sommes plusieurs auteurs à avoir supprimé de nos livres les noms de personnages célèbres qui y figuraient comme représentants de certains profils. En stage, je m’efforce même de ne plus citer de noms de personnes pour illustrer une base afin de préserver la neutralité bienveillante de chaque archétype.

En ces périodes électorales, la tentation est grande de prétendre typer tel ou tel homme/femme politique. Aïe !! Autant les parties « ombre »  de chaque archétype sont très bien décrites dans le Guide de l’Ennéagramme d’Helen Palmer ainsi que dans Ennéagramme, caractère et névrose de Claudio Naranjo, autant je propose de ne pas en rajouter en nommant les prétendus profils d’hommes/femmes politiques. Je n’y vois que des inconvénients :

  • Un politique est quelqu’un qui n’est aimé que par une partie de la population d’un pays. Voire qui, dans certains cas, est vénéré par les uns et détesté par les autres. En clair, dans l’inconscient collectif, ils/elles ont des connotations positives pour les uns ou négatives pour les autres, mais ne sont pas des référents neutres.

Par exemple, si vous cherchiez à « typer » tel président américain fraîchement élu :

  • Vous allez rompre la neutralité bienveillante qui devrait régner sur chaque archétype
  • Vous allez décaler l’attention sur « typer l’autre » plutôt que de demeurer sur « se remettre en question et rechercher l’unité intérieure »
  • Vous allez créer une polémique, les autres n’ayant pas forcément la même perception subjective de la personne citée
  • Vous n’allez pas aider les débutants qui ne l’aiment pas à s’identifier sur ce profil si c’est le cas
  • Vous n’allez pas aider ceux qui se sont identifiés sur ce profil et qui ne l’aiment pas à s’assumer
  • Vous n’allez pas aider les autres qui ne l’aiment pas à chercher à faire vivre cet archétype en eux-mêmes

Autrement dit, vous allez contribuer à « faire des vagues », alors que le propos consiste plutôt à « pacifier le terrain » pour mieux retrouver l’unité intérieure. De plus, quoi que vous disiez, vous ne changerez pas l’avis de la personne sur Mr Trump, mais vous risquez de changer la perception de votre interlocuteur sur le profil nommé.

Un exemple : En mai 2014, le Figaro publiait un article sur : “Comment l’Ennéagramme explique la rivalité Hollande/Valls ». Si vous aimez l’Ennéagramme, lisez le, cela devrait vous dissuader de typer un homme/une femme politique jusqu’au restant de vos jours…

Mais bon, si vous demeuriez dans l’envie de trouver des référents pour chaque profil, je préférerais, et de loin, que l’on se tourne vers les personnalités préférées des français (Voir le sondage biannuel de l’IFOP) pour lesquels la probabilité de « convergence de perception » et de «  perception positive » serait plus à même de valoriser tel archétype. Alors, résistons à la tentation et, à la demande des participants sur le type de Mr Trump, osons la réponse : « Est-ce vraiment important ? ».