J’ai toujours été chatouilleux sur l’animation de sessions Ennéagramme en entreprise.Je ne suis toujours pas sûr que ce soit le bon lieu où se “déshabiller” en présence de ses pairs.

Vu sous son angle originel, l’Ennéagramme ne consiste t-il pas à clarifier son travers principal ?

L’entreprise est-elle bien le lieu où procéder à cette recherche ?

Chaque année, cependant, deux ou trois entreprises m’appellent pour une intervention de cohésion d’équipe. Cela a encore été le cas cette année.

J’accepte à plusieurs conditions :

  • Nous ne sommes pas là pour proposer un stage Ennéagramme, mais pour faire un séminaire de cohésion d’équipe dont l’outil principal sera l’ennéagramme
  • Les participants doivent être volontaires et accepter de se remettre en question
  • Nul ne sera dans l’obligation de “trouver son type à tout prix”, ni d’avoir à le dévoiler devant ses collègues
  • Néanmoins, tous devront, au préalable, accepter de jouer le jeu de la vérité et de la transparence
  • L’objectif de l’intervention sera considéré comme atteint si :
  • De vieux contentieux entre les personnes ont pu être abordés
  • L’assertivité (oser parler plus facilement de choses qui fâchent) a pu être développée
  • Un plus grand respect pour la différence de l’autre a été mis en place
  • Les participants auront la possibilité de livrer leurs impressions, incognito, un à trois mois après l’intervention, par une feuille d’évaluation, remise directement au consultant.

Ce dernier point est crucial. Trop souvent, des feuilles d’évaluation sont proposées in situ, dans le dernier quart d’heure du stage. Alors qu’à ce moment, rares sont les participants qui peuvent se positionner clairement sur un éventuel malaise qu’ils ressentent.

Dans la forme, je trouve que le monde de l’entreprise en France est bien mental et que c’est ce mental, avec ses certitudes, qui brouille la communication. Et vous ne résoudrez pas grand chose, avec l’Ennéagramme seul, dans une équipe où trois ou quatre éléments font de la résistance au changement “dure”. Ces participants ont souvent peur d’une perte de territoire, d’une perte de structure ou du changement, tout simplement. On touche donc là à des émotions individuelles, respectables de leur point de vue, qui figent la dynamique collective dans un statu quo. S’ils acceptent de dire leur vérité, ces participants refusent la grille de l’Ennéagramme, autant qu’ils refusent de se remettre en question. Et vous ne ferez pas sauter le bouchon de fortes résistances avec une seule approche mentale, ce n’est pas possible. Alors ? Pour ma part, j’utilise autant ma formation Gestalt que ma formation Ennéagramme, pour insérer un minimum d’intelligence corporelle et d’intelligence émotionnelle dans ces interventions.Il semble que ce soient ces moments qui touchent le plus les participants. Et qui amènent une véritable prise de conscience des blocages et de l’intérêt d’un nouveau mode relationnel.

Et ça marche ? Cela dépend des objectifs fixés. Si la mission consistait à provoquer une prise de conscience collective et à proposer des pistes de changements, alors oui, ça marche. Les responsables sont d’autant plus satisfaits que le contrat avait été clairement défini. Inutile de préciser que l’implication des participants dans cette nouvelle dynamique doit se poursuivre par des piqures de rappel variées et/ou par du coaching individuel ou collectif.

En conclusion, je considère que l’Ennéagramme, utilisé avec précaution, par de vrais professionnels formés, combiné à d’autres outils, peut apporter une forme de conscience différente de soi et de l’autre, et donc favoriser une plus grande considération de la personne humaine dans l’entreprise. Ce n’est déjà pas mal mais, ne nous leurrons pas, si une prise de conscience collective devait se faire en France, je suis certain qu’elle se fera surtout par la prise de conscience individuelle de certains cadres qui viendront se remettre en question, individuellement, dans plusieurs stages Ennéagramme et qui auront l’humilité de ne pas s’arrêter là et de continuer à se remettre en question chaque jour, grâce à d’autres supports.