La Tour Infernale
Film de John Guillermin, 1974
avec Steve Mc Queen, Paul Newman
Ce film rend hommage à tous les pompiers du monde : « À ceux qui dédient leur vie afin que d’autres puissent vivre. » Autrement dit : à ceux qui accomplissent leur devoir pour assurer la sécurité de leurs concitoyens.
San Francisco, 1974. Inauguration du plus haut gratte-ciel jamais construit. Tout le gratin de la ville est réuni : maire, sénateur, célébrités. Le grand thème du film, c’est l’intérêt de prévoir le pire, afin d’éviter que de malencontreux concours de circonstances ne provoquent des catastrophes. Ici, petit à petit, on découvre que le système de sécurité n’a pas fini d’être installé, que des câbles électriques de second ordre ont été utilisés au lieu des plus fiables qui avaient été décidés, et que les portes coupe-feu n’ont jamais vu le jour. Le coupable ? Le gendre du promoteur, en charge de l’installation logistique. A t-il voulu faire des économies ? Est-il incompétent ? A t-il reçu des pots-de-vin ? Peu importe, le mal est fait. Des centaines d’hommes ont contribué à la réalisation de ce gigantesque projet et, pour un seul qui manque à son devoir, l’entreprise entière peut non seulement échouer, mais mettre en danger la vie d’innocents. Le film va impliquer l’autre principal responsable, le promoteur. Dialogue entre l’architecte joué par Paul Newman et le promoteur :
L’architecte : « Je croyais qu’on bâtissait un immeuble où l’on pouvait vivre et travailler en toute sécurité. Si tu devais réduire les coûts, pourquoi ne pas avoir limité le nombre d’étages ? »
Le promoteur : « Tu sais très bien que j’ai respecté la charte immobilière. »
L’architecte : « Oui, mais moi, j’ai vu l’envers du décor : aucun des conduits d’aération n’est ignifugé, les couloirs n’ont pas de portes coupe-feu…» Sous-entendu : « Toi, qui n’est pas de base Six, tu t’es contenté de donner les instructions et tu n’as pas pris le temps de vérifier qu’elles étaient bien respectées. »
Le film est social à double titre. Au niveau le plus général, l’événement concerne la ville, ses dirigeants et ses habitants. Ponctuellement, il implique trois cents personnes et évoque leur organisation commune face à une situation dramatique. Le personnage central du film, qui incarne le rôle de Six social est Mike, le chef de la brigade des pompiers, joué par Steve Mc Queen. Arrivé sur les lieux, il ne se démonte ni face au standing des personnalités présentes, ni face à la grosse voix du promoteur soucieux de son image sociale. Même si l’incendie ne semble pas encore dramatique, il va envisager le pire scénario possible, demander immédiatement l’annulation de la soirée. Ensuite, il va déployer les qualités propres à ce profil : prise en compte de nombreux paramètres, anticipation des conséquences possibles, comme la chute des éclats de verre sur les quartiers alentour, et forte imagination sur les moyens à déployer comme l’appel à l’aéronavale pour l’envoi d’hélicoptères. Mais la poisse s’accumulant, la force du vent ne va permettre à cette idée de résoudre la situation. Par le biais des autres personnages, le film nous montre aussi les deux comportements extrêmes du Six : panique et perte de lucidité d’un côté, courage et prise de risque, de l’autre. Le terme de responsabilité revient de nombreuses fois, notamment lorsque le gendre du promoteur s’en prend à sa femme : « Tu es incollable sur la responsabilité. Chez les Duncan, on est très fort sur la responsabilité et le sens du devoir. » Réponse de son épouse : « Je ne vois pas le mal qu’il y a à avoir le sens du devoir ! » Notre chef des pompiers, Mike, alias Steve Mc Queen, va nous montrer jusqu’où peut aller ce sens du devoir. Il va se faire héliporter sur le sommet d’un ascenseur extérieur bloqué par un court-circuit au soixante-dixième étage, pour couper un câble au chalumeau, relier l’ascenseur à l’hélicoptère et ramener au sol les douze passagers qu’il contenait. Ouf ! Plus tard, il risquera encore sa vie, par devoir, pour faire exploser des réserves d’eau au sommet de l’immeuble afin de noyer l’incendie. Sans moyen de rapatriement, il courra le risque d’être emporté par les chutes d’eau provoquées par l’explosion. La conclusion est aussi éloquente sur ce profil : « On a eu de la chance, cette fois-ci, mais ce genre de catastrophe risque de se reproduire jusqu’à ce que l’un de vous ne vienne me demander comment les construire. » dit-il à l’architecte. L’ambiance Six est bien présente dans ce film : danger, insécurité, doute, suspense. Frissons garantis.