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Film d’Elia Kazan, 1956

avec Caroll Baker, Eli Wallach, Karl Malden

 

L’histoire

État du Sud des États-Unis, dans les années trente. Un industriel ruiné vit avec sa très jeune femme dans les restes de sa vaste demeure. Si le mariage est effectif, il ne doit réellement « prendre corps » qu’à la date du vingtième anniversaire de la jeune femme, dans deux jours…

Le cadre général du film

Un peu d’énergie survie, dans cette pauvreté des années trente. Un peu de social aussi pour décrire l’état de la population noire ces années-là. La guerre de sécession date et, pourtant, la ségrégation est toujours bien présente. Mais le grand thème du film : ce sont les relations en tête-à-tête. La triangulation entre les trois acteurs principaux donne lieu à de mémorables scènes de « jalousie », de « compétition/haine », de « possession/reddition »… Bref, la quasi-totalité des mots-clé permettant d’appréhender ce sous-type est passée en revue.
Quant au profil Deux, on parle beaucoup dans les livres du côté attentionné, altruiste de ce profil. On parle beaucoup moins de son côté séducteur. Or, avant de pouvoir rendre service à qui que ce soit, encore faut-il que l’autre vous regarde ! Et le profil ennéagramme Deux est généralement un beau représentant de la gente séductrice. Claudio Naranjo en parle d’ailleurs très bien dans son livre  Ennea-type structures.

L’alliance du profil Ennéagramme Deux et du sous-type tête-à-tête…

…est si étroite que les deux éléments sont ici quasiment indissociables. «Baby Doll », cette femme-enfant de vingt ans possède à la fois la faculté du Deux à séduire pour créer un lien et la faculté du tête-à-tête à concentrer l’attention de l’autre sur elle. Ces deux aptitudes se démultiplient et engendrent de la « séduction extrême » appelée dans le jargon ennéagramme : « séduction/agression ». Ici, c’est comme un phénomène à plusieurs étapes. Si son premier niveau de séduction suffit : OK. Sinon, elle passe au niveau supérieur : elle va augmenter la proximité, le velours du regard, la sensualité des gestes, l’érotisme des propos jusqu’à obtenir l’intensité du lien désiré. Cette séduction provocatrice lui donne parfois un côté « allumeuse » qui doit gérer les effets de la sensualité débordante qu’elle génère. Obligée de battre le froid après avoir engendré trop de chaud, Baby Doll procède par va-et-vient : « Je ne pourrais pas manger une noix qu’un homme a cassé dans sa bouche… ». Plus loin : « Ne me touchez pas, je n’aime pas que l’on me touche.. »  alors que sa voix et son corps émettent des signes disant le contraire !
La problématique du profil ennéagramme Deux et celle du tête-à-tête s’amplifient également : Baby Doll est à la fois sûre de son pouvoir de séduction et dans le besoin permanent de se rassurer qu’il marche toujours : jeux de séduction, jeux de pouvoir, manque de confiance et amplification de la séduction. Regard de braise qui rend fou le mari. C’est comme une danse : deux pas en avant, un pas en arrière… Mais c’est moi qui mène le bal, en fonction de mes humeurs !
Souvent, dans les livres, on associe le travers du Deux au mot de « Manipulation ». Pourquoi pas ! Le Petit Larousse précise : diriger à sa guise une personne, l’amener à faire ce que l’on veut. Pour ceux qui s’intéressent aux mécanismes de défense des différents profils, nous proposons, au CEE, un exercice de David Daniels sur les neuf moyens que chaque profil ennéagramme met en œuvre pour prendre le pouvoir, la domination et le contrôle sur les autres. La conclusion de l’exercice est éloquente : chaque profil a ses propres stratagèmes de manipulation. Certains sont d’ailleurs, surprenants…. Mais revenons à Baby Doll. Manipule t-elle ? Oui, probablement. En fait, comme toutes les bases Deux, elle est dans une grande demande affective et, pour combler cette béance insondable, elle commence par user de son arme favorite : la séduction.

Ce qui m’a touché
  • L’étendue de la gamme des regards, tonalités de voix, gestes dont la représentante de ce profil dispose en termes de séduction. Vaste programme !
  • L’évolution de cette femme entre le début et la fin du film. Comme le dit Vaccaro, le syndicaliste italien : « Tu as changé. » On est, en effet, passé de la lolita sans grande envergure à la jeune femme désirable et décidée.
  • Les différents tête-à-tête entre les trois protagonistes.
  • La prestation épatante des acteurs qui valut au film quatre nominations aux Oscars en 1956.