2013, film de Lee Daniels

avec Forrest Whitaker

L’histoire

Le jeune Cecil Gaines, en quête d’un avenir meilleur, fuit, en 1926, le Sud des États-Unis, en proie à une ségrégation proche de l’esclavage. De fil en aiguille, il devient barman dans des établissements de plus en plus huppés, jusqu’à devenir majordome à la Maison-Blanche. Il y verra passer sept présidents des Etats-Unis, et sera témoin de conversations dans le bureau ovale.
À travers le regard de Cecil Gaines, le film retrace l’évolution de la vie politique américaine et des relations entre communautés. De l’assassinat du président Kennedy et de Martin Luther King au mouvement des Black Panthers, de la guerre du Vietnam au scandale du Watergate, Cecil vit ces événements de l’intérieur, sans oublier son rôle de père de famille, pas facile tous les jours avec un fils revendicatif…

Le Profil Neuf

Deux événements marquants illustrent la structure du profil Neuf : enfant, avoir exprimé son opinion provoque la mort de son père donc littéralement, nommer son point de vue peut engendrer non seulement du conflit, mais aussi de la destruction.
Ses premières instructions à la Maison Blanche sont claires : tu n’entends rien, tu ne vois rien, tu ne dis rien. Facile à dire, surtout quand, pendant plusieurs décennies, certains occupants de la pièce vont y aller de leurs commentaires racistes…
En Neuf, cela veut dire anesthésier ses premières réactions, donc engourdir son corps de ses impulsions, donner une apparence pacifique et se rendre invisible. Ou tout au moins se comporter comme un meuble, un objet sans état d’âme, une potiche. C’est la définition du mécanisme de défense récurrent chez ce profil : narcotiser son corps pour éviter toute immédiateté verbale ou corporelle. Un moyen pour faciliter ce processus débouche souvent, comme dans ce film, sur une vie routinière. En gardant des habitudes constantes dans la vie quotidienne, le Neuf sécurise toute réactivité aléatoire face à l’imprévu. Helen Palmer le nomme comme suit :
« En s’engluant dans des activités familières connues, le Neuf perpétue un schéma qui leur évite d’avoir à se fixer des priorités »… ou de réagir.
Le fait de retenir l’énergie garantit un état d’équilibre dans lequel il y en a juste assez pour s’occuper que quotidien sans avoir à se poser de questions. Cécil Gaines va exceller dans ce rôle, ce qui explique probablement sa longévité à ce poste. Autre argument pour ce profil : la placidité avec laquelle, poussé par les autres employés « de couleur », il va, plusieurs fois demander que leurs salaires soient aligné sur ceux des employés « blancs ».
Les mots sortent, mais jugulés par une calme tempérance apparente.

Le sous-type survie

Une des premières caractéristiques de ce sous-type est de sécuriser le territoire.
Le film nous montre que Cécil n’en a que deux : sa maison familiale et la Maison Blanche. Les horaires sont calés, l’itinéraire de l’un à l’autre aussi, les tâches bien rodées. Pas d’éclat en tête-à-tête et surtout, pas d’opinion sociale. Juste assurer la routine, sobrement. En fait, l’émotion de ce film provient surtout du décalage entre le personnage principal en survie et la trame du film, très sociale :
sur cinquante ans, on assiste à la progression des droits civiques, à l’évolution de la considération multiraciale, à l’implication de Malcom X et de Martin Luther King. Sept présidents défilent, (intéressants contrastes de caractères) avec quelques images de leur époque et la force tranquille de Cécil, dans son Neuf survie, est un merveilleux clin d’œil à la chaleur humaine stable du sous-type survie dans cet environnement très social de la Maison Blanche. Sans compter que son fils est, lui, d’un sous-type social, ce qui va provoquer moult conversations frontales entre les deux mondes.

Conclusion

Émouvant, intéressant, sublimement interprété et une conclusion étonnante…
Bon film !