invictus-v2

Film de Clint Eastwood, 2010,

avec Morgan Freeman et Matt Damon

 

 

Synopsis

En 1994, l’élection de Nelson Mandela consacre la fin de l’Apartheid, mais l’Afrique du Sud reste une nation profondément divisée sur le plan racial et économique. Pour unifier le pays et donner à chaque citoyen un motif de fierté, Mandela mise sur le sport, et fait cause commune avec le capitaine de la modeste équipe de rugby sud-africaine. À l’époque, le rugby est un sport de blancs. Leur pari : gagner le championnat du Monde 1995…

Le profil Ennéagramme Un

Dans sa version courte, le film a malheureusement été amputé d’une bonne demi-heure au début, où la personnalité de Mandela apparaît plus clairement. Depuis le départ, Nelson Mandela est un râleur, un revendicateur. Il proteste à chaque fois que quelque chose ne lui semble pas correct. Les adjectifs qui le qualifient le plus souvent sont : dignité, détermination et fermeté. En prison, il sera coopté par ses pairs pour les représenter face aux autorités. Il y organise des cours, au point que la prison sera bientôt appelée : l’Université.

Le film est assez près de la réalité historique, notamment quand on regarde les vraies images de sa libération de prison. Elles sont assez semblables à ce que l’on voit dans le film. Il n’y a pas de rancœur, pas de désir de vengeance. Dans de nombreux livres Ennéagramme, le « nom de baptême » du profil Un est le « Réformateur ». Mandela fait probablement partie de ce profil. Ce que le film nous montre, c’est davantage la version de ce que le Un donne à son plus beau, une fois domestiquée la colère intérieure. Dans Invictus , Mandela a réussi à sublimer sa colère, pour son mieux-être et celui de son pays. François Piennaar, le capitaine blanc de l’équipe de rugby déclarera la veille du match à sa femme qui lui demande s’il s’inquiète du résultat de la finale du lendemain : « Non, de ce côté là, ça va, que l’on gagne ou que l’on perde, nous avons déjà gagné cette coupe du monde en arrivant en finale. Non, ce qui me préoccupe c’est de savoir comment, un homme qui vient de passer 25 ans en prison peut arriver à tendre la main à ceux qui l’ont incarcéré ? ». Réponse : il a dépassé la dualité dans laquelle la plupart des profils Un sont enfermés : c’est bien ou c’est mal, c’est blanc ou c’est noir. De nombreux films de Clint Eastwood traitent de ce thème et vont souvent dans la même direction : à la fin, le héros a trouvé une solution qui dépasse le clivage. C’est encore vrai ici.

Deux autres scènes m’ont marqué : l’une ou Mandela entend que le nouveau Ministre des sports est en train de faire voter une loi abrogeant le drapeau et l’hymne national d’Afrique du Sud. Il va aller sur place et engager son autorité afin qu’hymne et drapeau soient conservés, et que la communauté noire fasse l’effort de se rallier à ces symboles honnis depuis des années. En clair, il va être exigeant avec lui-même et exigeant avec les autres pour aller ensemble vers l’unité.

L’autre scène est celle où peu après son investiture, son nouveau chef de la sécurité lui dit manquer d’effectifs. Il va alors rappeler l’ancienne équipe, celle qui pendant des années pourchassait Mandela et ses alliés pour les mettre en prison, et leur demander de continuer leur activité : assurer la sécurité du Président… qu’ils considéraient, il n’y a pas si longtemps encore comme l’ennemi N° 1. Les deux équipes considèrent toute coopération comme impossible, mais Mandela va user de sa détermination pour les persuader de collaborer… pour l’unité du pays.

Le sous-type social

Peter O’Hanrahan, le Directeur International de l’école de la tradition orale, parle de ce profil Ennéagramme en ces termes : « Leur envie de vouloir faire les choses correctement, rend difficile leur adaptation à de nouvelles situations et peut également générer du ressentiment et de la critique envers ceux qui agissent “incorrectement”. » Ici, on est au delà de cet écueil. Tous les auteurs Ennéagramme sont unanimes : les représentants de ce profil doivent apprendre les nuances. Ici, c’est encore plus fort, il y a alliance entre « blanc » et « noir ».

Plus généralement, le sous-type social ne fait aucun doute : Mandela est un homme qui, depuis le départ, a eu la vision du devenir d’un pays, qui a appris le droit pour mieux servir son pays, qui a créé des réseaux, trouvé des alliés à l’étranger, su se faire entendre de la communauté internationale, a su être socialement influent pour faire gagner sa cause et, finalement, a su structurer une équipe pour diriger un pays, alors que personne de son camp n’avait de l’expérience.

Apprentissage Ennéagramme 

Nous ne parlons ici que du profil Un social, mais, en fait, nous sommes tous concernés par la dualité. Et donc, tous concernés par le dépassement de nos contraires. Puisse ce livre  servir de référence à tous ceux qui sont en tension entre deux polarités contraires. Demandez aux représentants des profils Deux et Cinq ce qu’ils pensent de la dualité « Dépendance-Indépendance ».

Par ailleurs, cet exercice de proposer un rôle de cinéma pour illustrer l’un des 27 profils atteint ici ses limites. Le rôle proposé, en dehors des quelques scènes mentionnées, évoque un profil Un ayant tellement travaillé sur lui que sa colère intérieure ne se voit plus vraiment. Au point que sur le comportemental seul, on pourrait confondre son énergie avec celle d’un profil Neuf social, plus bonhomme, plus rond, moins raide.  Sans compter que le profil de l’acteur est peut-être différent de celui du rôle qu’il interprète. Finalement, je ne cherche qu’à illustrer certains archétypes par des rôles de cinéma. Cet exercice ne sera donc jamais une science exacte. Par ailleurs,  certains participants m’avaient dit avoir été un peu rude avec leur profil en choisissant dans mon livre : La Clé de L’Ennéagramme, les sous-types”, le rôle du maître d’hôtel dans les Vestiges du jour, une incarnation un peu « coincée » de ce  profil Un sous-type social. Ici, nous avons un peu l’autre extrême : un représentant tellement accompli, que les traits habituels du type ont été limés au point qu’une confusion avec un autre profil devienne possible. Tant mieux. De plus, je pense qu’en termes de détermination, d’obstination, d’abnégation et de gestion du long terme, le Un social et le Neuf social sont plus près l’un de l’autre qu’on ne le pense généralement.

César du meilleur film étranger 2001, Morgan Freeman a également été plusieurs fois nominé pour son rôle de Mandela. Si le film manque de fluidité par moments, il y a de nombreux temps forts et de beaux moments d’émotion, sans oublier quelques scènes de rugby prises sous la mêlée, saisissantes de réalisme. Bon film !