(The Queen’s Gambit) est une mini-série américaine en sept parties
2020 de Scott Franck et Allan Scott,
avec Anya Taylor-Joy, Chloe Pirrie, Marielle Heller
L’histoire
Au début des années 60, en pleine guerre froide, le Jeu de la Dame retrace le parcours d’une jeune orpheline prodige des échecs, Beth Harmon. En lutte pour surmonter une addiction, elle va tout mettre en place pour devenir championne d’échecs dans un monde jusque là réservé aux hommes.
Le profil Cinq
Est assez patent : le verbe est minimaliste, l’expression des émotions inexistante, le mental surpuissant, au détriment du coeur et du corps, trop souvent.
Beth nous fait vivre la polarité dépendance/indépendance, propre aux personnes de ce profil Cinq. D’un côté, je n’ai besoin de personne, c’est trop cool d’être autonome et indépendante ; d’un autre côté, cette indépendance mène à une solitude forcée. Compliqué ! De plus, quand on s’attache peu et qu’on perd un être cher, la dévastation émotionnelle est conséquente. On se retrouve alors face au même dilemme : ne surtout jamais s’attacher à personne ou, au contraire, élargir le nombre de liens, même si chaque lien crée une forme de dépendance affective. Cornélien ! Beth va, peu à peu, s’ouvrir à ses émotions et nous montrer le chemin d’évolution propre au Cinq, que l’on appelle Non-attachement dans l’Ennéagramme : oser accueillir l’émotion tout en la laissant passer, sans vouloir s’y attacher ou la retenir.
Le sous-type tête-à-tête
Là encore, pas beaucoup de suspens sur le sous-type, le faisceau d’indices converge dans une seule direction :
- L’existence d’une meilleure amie (C’est très souvent le propre de ce sous-types lors de leur scolarité : un/une meilleur ami(e) plutôt que « des » copains.
- Une passion ou une vocation : la capacité de zoomer sa concentration dans une direction, tant dans sa vie en général que dans l’instant. Quand Beth se concentre sur sa partie, on voit bien que le monde extérieur n’existe plus. Dans l’Ennéagramme, on parle de « Fixation » ; chez les profils en tête-à-tête, cette fixation ressemble à un laser, hyperconcentrée dans la direction concernée.
- Un côté fashion sexy : l’habillement sert mon sex-appeal. Je ne cherche pas forcément à être la mode pour être à la mode, les vêtements portés sont au service de ma féminité. L’idée est d’apparaître séduisante, d’attirer le regard sur moi.
- Le sens de la compétition. Laure Manaudou a dit un jour : « En fait, je n’aimais pas vraiment la natation pour la natation, ce que j’aimais, c’était gagner ». C’est la même histoire pour Beth : elle ne « joue » pas aux échecs, elle est là pour gagner. En face-à-face. Un contre un. Et c’est moi qui gagne. Un tête-à-tête gagne parce qu’il/elle joue bien et/ou parce qu’il/elle déploie son jeu en fonction de son adversaire.
Analyse
J’ai souvent pensé que pour qu’un film/une série soit réussi(e), il fallait que les trois sous-types soient respectés. C’est le cas ici. En survie, la première partie de vie évoque le décès de la mère, l’orphelinat et des conditions de vie précaire. Le tête-à-tête a été évoqué plus haut, sans compter le lien privilégié avec le concierge. Le social existe d’une part avec l’enjeu de la guerre froide : il est important socialement pour les États-Unis de battre les russes aux échecs, via leur représentante ; d’autre part, il est également question du combat social de l’émancipation de la femme. Qu’elle le veuille ou non, Beth ne se bat pas juste pour elle, elle se bat pour changer l’image de la femme dans le monde. Et le soutien des femmes russes qui attendent pendant des heures dans la rue « leur » championne américaine à la sortie de ses parties témoigne de cet aspect social.
Poétique et puissant, la série vous donne envie de vous mettre aux échecs, alors que jamais, le réalisateur ne vous prend la tête avec les coups joués. Au fond, avec sa sobriété et son côté épuré, le film démultiplie l’épaisseur des émotions et on est fasciné par le parcours de cette femme qui en a peur et qui finit par les apprivoiser pour son mieux-être.
Les acteurs sont formidables, notamment Anya Taylor-Joy, dans le rôle principal et, techniquement, la réalisation est emballante : photographie, costumes, décors, musique… À vous pour sept heures de kif !